Spook & The Guay

1er Avril 1998, les font un passage dans Cigale Mécanik pour présenter leur premier album, « Mi Tierra ». Morceaux choisis d’une interview fort conviviale…

 

Cigale Mécanik : Les Spook & the Guay vous nous arrivez avec… moult boissons alcoolisées, mais aussi avec un tout nouvel album  » Mi Tierra  » ; pour tous les auditeurs qui ne connaîtraient pas le groupe comment vous le présenteriez au niveau musical ?
Xavier : Disons qu’on se rapprocherait d’une famille qui comprendrait la Mano Negra, les Fabulos Cadillacs, c’est-à-dire un mélange de rock latino, de reggae, de ska, de dub…
Niko : Par rapport aux groupes français on va se situer dans la famille Ruda Salska, Kanjar’Oc, Crazy Skankers, Kargol’s… une mouvance plutôt chaleureuse et mélangée au niveau des styles musicaux. Y’a beaucoup d’influences jamaïcaines et puis une part d’influences plus latines, plus espagnoles, dans la mesure où on a trois membres du groupe qui sont d’origine espagnole. Puis bon, on habite à Toulouse ; comme chacun sait, Barcelone ou la frontière ne sont pas bien loin…

CM : Ca fait pas mal de temps que vous existez. On a l’impression de vous connaître depuis un petit moment, dans la mesure où vous avez écumé bon nombre de scènes dans l’hexagone. En fait, exactement, ça fait combien de temps que la formation existe telle qu’elle est actuellement ?
Xavier : Telle qu’elle est actuellement… disons qu’il y a un trompettiste qui est arrivé il y a trois ans, et un bassiste un an avant mais sinon, ça fait sept ans que le groupe existe ; et ça fait trois ans qu’on tourne vraiment d’une manière vigoureuse et régulière.

CM : Sept ans, la sortie d’un premier album au bout de sept ans d’existence…
Xavier : Ouais, c’est pas commun.

CM : Comment tu expliques ce délai si important ?
Niko : Y’a eu plusieurs trucs. D’abord le premier paramètre c’est qu’en fait quand nous on s’est formé, déjà on était assez jeunes, puis on a vraiment appris à jouer ensemble, quoi. C’est-à-dire c’est pas comme un groupe qui se formerait où chaque membre a déjà de l’expérience derrière lui. Nous on est vraiment partis de rien du tout. Il a fallu déjà un long moment pour arriver à un truc qui tienne la route, musicalement.
Puis nous assez rapidement, on a privilégié l’idée qu’on souhaitait tourner et avoir quand même une certaine expérience, avoir les reins solides, quoi. On voulait vraiment éviter le cliché du groupe de petits jeunes qui se monte vite fait, qui font un album au bout d’un an, vite fait donc souvent pas très bien fait, et qui se casse la gueule un an après, parce qu’ils sont pas habitués à tourner, ils s’aperçoivent que c’est pas facile et qu’en fait ils s’entendent pas très bien et qu’en fait ils avaient pas du tout envie de faire la même chose tous ensemble… Tu vois, ce genre de truc.
Donc, nous c’est vrai qu’on est partis à priori dans cette idée là. Après, on a été un peu rattrapé par ce truc là, quoi ; c’est-à-dire que finalement à force de tourner, tourner, tourner sans trop enregistrer on s’est retrouvé un peu avec moins de perspectives…
C’est vrai que les grandes maisons de disques parisiennes nous téléphonaient pas tous les matins pour nous proposer des contrats. Donc après, on a peut-être perdu un peu de temps… je sais pas, ça c’est à voir.
Et donc là on arrive à ce moment là où on se dit bon, maintenant ça serait bien qu’on sorte le disque. On pense qu’on est en mesure de le faire correctement… donc voilà. On a autoproduit en fait cet album et après on a signé une licence. Il est distribué en France, Belgique, Suisse, Canada par MSI – c’est une boîte qui est basée à Marmande – et en Italie, en Espagne par un label qui s’appelle Gridalo Forte qui est un label italien, hyper indépendant, alternatif.

CM : Là vous arrivez avec un premier album avec un son assez élaboré. Pour une autoproduction, c’est assez rare. Vous avez beaucoup investi là-dedans ?
Niko : On a pas mal investi, ouais. Puis, c’est pareil on a vraiment voulu le faire dans des conditions… optimales. C’est-à-dire un bon studio, c’est un studio qui s’appelle le chalet autour de Bordeaux, dans un cadre hyper agréable puisque y’a un grand parc, la piscine et tout ça… c’était au mois d’août dernier. Donc, c’est vrai que passer 26 jours en studio, bon, c’est quand même du travail, quoi.
Dans les moments de creux ou les moments où tu as envie de te reposer un peu ou de prendre l’air, c’est vrai que c’est plus agréable de sortir dans un petit parc et d’aller plonger, que de sortir à Toulouse dans une rue et puis d’être tous les soirs dans les bars. Là on était vraiment au cloître, dans un monastère, quoi !
Un autre truc aussi, c’est que notre sonorisateur Chinoi, qui connaît hyper bien ce studio puisqu’il a enregistré vachement de disques là-bas, et donc il connaît bien le patron du studio – c’est un pote à lui – donc celui-ci lui laisse un peu carte blanche, lui laisse les clefs du studio… ce qui fait qu’on a aussi pu faire des journées qui dépassaient largement les horaires syndicaux, quoi.
Xavier : C’est-à-dire qu’il y a eu des prises de son à 4h du mat’, comme à 14 heures.

CM : Vous êtes rentrés directement en studio en ayant exactement l’idée de l’album que vous vouliez faire ou le studio a beaucoup modifié votre idée de départ ?
Niko : En fait, à vrai dire on a à peu près retranscrit les morceaux tels qu’ils sont sur scène. On a pas trop refait d’arrangements par rapport à ces morceaux live. C’est vrai qu’en général le concert c’est vraiment un truc à part. Donc on peut se permettre en concert de faire des morceaux qui durent 10 minutes, et qui passent par plein de climats différents, un peu plus patchwork, quoi. Mais bon, c’est en concert, ça joue sur un autre type d’énergie… de spectacle, tout ça.
Et en fait ces morceaux-là on les a pas mis sur le disque, tout court. Et les autres on a peu changé d’arrangements. Y’a juste un morceau qu’on a voulu travailler entièrement digital, avec les ordinateurs, parce que c’est un morceau qui tourne un peu ragga… On avait envie pour nous, pour le plaisir, de le faire entièrement dans l’esprit vraiment typique c’est-à-dire qu’avec des ordinateurs qui tournent, des machines et juste les chanteurs. De naturel, y’a que les voix.

CM : C’est quel morceau ?
Niko : C’est un morceau qui s’appelle  » Sit upon the riddim « .

CM : Sinon, l’album s’appelle  » Mi Tierra « . Doit-on y voir là un message d’universalité ?
Xavier : Ben, ouais pourquoi pas. On préfère le voir dans cette optique là que dans une optique de repli sur nous même, et de retranchement derrière nos frontières. Ouais, c’est un peu un signe d’ouverture.

CM : Vous avez la particularité d’être un groupe basé à Toulouse donc en France, mais vous chantez en espagnol, en anglais, très peu en français… Pour quelles raisons ?
Xavier : Peut-être parce qu’au départ c’était plus évident pour nous. On avait beaucoup écouté du reggae donc forcément beaucoup d’anglais, de jamaïcain…
Niko : Ca nous semblait plus juste au début.
Xavier : Voilà… maintenant on commence à se mettre au français petit à petit. Je crois qu’il faut mûrir pour passer au français et on est en train de mûrir, quoi !
Niko : C’est vrai que c’est ça… Si tu veux dans la mesure où on écoutait très peu de musique francophone…
Xavier : On a de fortes influences anglo-saxonnes ou latines.
Niko : Du coup on était pas portés naturellement sur le fait d’écrire en français. C’est vrai qu’après coup… soit parce qu’on s’est aperçu que c’est bien, ne serait-ce que pour le public, que les gens comprennent les paroles, c’est quand même intéressant. Et puis pour nous aussi peut-être parce qu’on a mûri, on a un peu plus envie de se lâcher en français.
Seb : C’est vrai que c’est difficile d’écrire en français parce que dès qu’un texte est en français, les gens le prennent de suite… ils captent les paroles immédiatement. Quand c’est en espagnol c’est plus mêlé avec la musique, c’est plus un ensemble paroles-musique…
Niko : Et puis ceci dit par rapport à toutes les histoires qu’il y a eu par rapport aux quotas, on trouve plutôt bien finalement que le seul morceau qui soit en français sur le disque soit le morceau qui prêche l’anti-racisme, l’anti-xénophobie… tout ça. Donc chanté en français, dans la langue du pays…
Xavier : Avec un beau titre en anglais ! ! ! (Rires)

CM : Oui, c’est Anti-racist soldiers… le rock peut-il servir d’expression à un certain militantisme ?
Xavier : Oui, oui… façon militantisme, on doit tous l’être plus ou moins dès qu’on s’exprime (sic). On est pas non plus un groupe engagé dans une quelconque politique…
Niko : Ouais, on est pas engagés à tout crin… C’est pas non plus notre cheval de bataille de dire  » voilà on est LE groupe engagé qui vient… « , voilà quoi.
Xavier : On exprime des idées que devrait avoir tout être humain normalement constitué et à peu près équilibré.

Propos recueillis dans le studio de Radio FMR, le 1er Avril 1998.

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