Los Mocosos

(Bordeaux juin 2002)

Présentez vous ? Quelles sont vos origines car vous êtes de différentes nationalités je crois ?
Je suis Gabriel Sandino, le guitariste, d’origine nicaraguayenne et mexicaine. Il y a Victor Castro notre tromboniste nicaraguayen et mexicain aussi, Pares Péruvien à la batterie, Gordon « Shorty » Ramos au saxo d’origine portoricaine italienne mais aussi hawaïenne, le nouveau bassiste Mickael Pilo Lazaros (?) est Portoricain, notre clavier Steve Carter est le seul américain du groupe (il est d’Oakland) et enfin José « Manny » Martinez de Porto-Rico.

En quelle année est né le groupe ?
Gabriel et José : En 1999. Le groupe est né grâce à une chanson sortie en 1998 dans une compile pour « Aztlan Records », qui n’existe plus aujourd’hui. A l’époque il n’y avait pas de groupe et Happy Sanchez, le producteur de la compile, nous a proposé à Andy Turnee (?) et à moi (José) de nous réunir avec lui pour faire une chanson afin de compléter le disque. Mais c’était comme une blague, pour le fun. Pourtant, ce morceau sans groupe a été le seul à avoir du succès à la radio si bien que les gens demandaient les Mocosos. Il a donc fallu créer un véritable groupe né en 1999 autour de 4 personnes mais aujourd’hui les membres ont changé.

Vous êtes nés après le disque ! c’est incroyable ! la renommée est née avant le groupe !
G et J : Le directeur du label ne comprenait pas car le titre était une plaisanterie et quand les gens ont commencé à appeler car ils voulaient un disque et une tournée, il a dit : comment avez-vous pu choisir un nom aussi débile, mais c’était seulement une plaisanterie à l’origine. On commença alors à dire qu’il fallait changer le nom du groupe et du label mais le directeur a dit non, car les gens aimaient ce nom.
Nous avons de la chance d’avoir du succès. Le groupe est né organiquement, tu comprends ? Le groupe en soi est plus grand, plus important que n’importe quel individu du groupe, c’est à dire qu’il a sa propre vie…La chanson est d’abord apparue puis le groupe. Depuis beaucoup de gens nous ont quittés ou rejoints mais Los Mocosos continue. Le leader en tant que fondateur, Happy Sanchez, n’est plus là, il est parti il y a deux mois. D’abord on a cru que sans lui il n’y aurait plus de groupe mais on est toujours là, on continue.
(Un autre) : Si on te coupe un bras, un autre pousse.

D’où vient le nom ?
Littéralement cela signifie un jeune qui a de la morve sortant de la narine. Mais en Amérique centrale et du sud on utilise ce mot pour signifier de l’affection, de la tendresse à ses enfants. (En rigolant) : Viens mocoso par ici. En ce qui concerne le groupe c’est parce que Happy Sanchez, Victor et Shorty et Andy , les 4 premiers membres se connaissent depuis qu’ils sont mocosos (gamins). Voilà d’où vient le nom du groupe.

Quel est votre parcours, votre cheminement musical ?
Ahahah, la fameuse question du parcours musical.
D’abord, je vais être clair, même si nous sommes d’origine latino-américaine, nous sommes un groupe américain, nous sommes nés et avons vécu aux Etats-Unis. Nos parents sont les immigrés de la première génération. Nos influences c’est donc tout ce qu’on écoute dans les radios, tout ce que nous voyons à la télé (MTV…) ou écoutons à la maison (la musique de nos parents). Il n’y a pas de véritable parcours musical. Nous essayons de mélanger tout ce que nous savons faire musicalement. Tout.
(Un autre) : Tout ce que nous écoutons depuis enfants, la salsa, la soul, le funk, le hip-hop, le ska , le R§B, A.Franklin, la disco, le jazz. Tout ce qui sonne bien, c’est comme une soupe.

Vous êtes donc un groupe nord américain aux origines latino-américaines, vers quel bord penche le cœur du groupe ?
Du coté latino forcément, de nos racines.

Vous êtes un groupe de quartier non ? quelle influence à votre quartier tant sur votre musique que sur les textes ?
Cà change avec le temps car le quartier d’où l’on vient « la Misión de San Francisco » est peuplée de gens issus du Mexique, d’Amérique centrale, du sud et des Caraïbes. La musique qu’on écoute dans ce quartier est variée comme la population est comme la musique que nous jouons. Nous sommes le reflet de ce qui s’y passe. Par exemple tu te ballades dans la 24ème rue à Misión et tu entends une voiture qui passe avec les baffles à fond et plus loin tu entends Waldy MC ( ?) dans une maison et encore plus loin c’est Led Zeppelin. C’est ce qu’il y a de bien dans le quartier. On écoute de tout. Le quartier signifie un melting pot .

De plus la ville de San francisco a une culture musicale très importante aux USA depuis les années 60 !
Oui très importante, surtout dans le Rock’N’Roll dans les années 60. Dans les années 60-70, Santana fut le premier et le seul à cette époque à mélanger le rock avec la musique latine. Et nous, nous sommes différents de ce qui s’écoute actuellement dans le genre « rock en espagnol », car nous ne sommes pas un groupe de rock en espagnol. Beaucoup de gens essaient de nous cataloguer mais je ne crois pas que ce soit possible .

Tu parles de melting-pot. Dans le premier album il y avait un dosage équilibré de chaque style musical.
Par exemple on mélange le ska et la salsa et on appelle cela la skalsa.
Le premier album était plutôt ska parce que le directeur de la compagnie de disque voulait que l’on fasse un disque et on s’est dit que va t’on faire ? On s’est mis dans un studio. Le premier c’était en fait seulement pour enregistrer quelque chose mais le deuxième a une orientation, une direction. Le premier fut enregistré par désespoir donc il est resté cloîtré dans un style musical à prédominance ska. Mais pour le deuxième, avec un nouveau chanteur et de nouveaux membres, le groupe avait enfin une identité. Il n’en avait pas pour le premier. On a pu explorer davantage .

Cela explique le grand nombre de reprises sur le premier album. Vous n’aviez pas assez d’existence pour faire des choses plus originales !
Il y avait beaucoup de désespoir et de pression pour Happy Sanchez qui devait compléter un disque en un certain temps. On n’avait pas notre vision actuelle, avant on faisait une chanson de çà puis de çà, mais aujourd’hui on mélange tout dans la même chanson ska, salsa …

Parlons du nouvel album …
Il vient de sortir en Europe (2002) mais est sorti depuis 2001 aux Etats-Unis.

Il est sorti sur un nouveau label ?
Oui, « Six Degrees ».

Pourquoi ce changement ?
Car Aztlan n’existe plus et car un représentant de Six Degrees, qui est un petit label de San Francisco spécialisé dans la world music, est venu nous voir . Cà leur a plu …
(Un autre) : Nous n’avions plus de label et nous sommes parti en tournée pour faire notre promotion afin de pouvoir continuer à jouer.

Qu’est ce que vous attendez d’un label ?
Qu’il s’intéresse et s’occupe de nous bien entendu et car … Ecoute on n’est pas un groupe « mainstream » qui passe sur MTV, du moins pour le moment, on ne sait jamais, et donc ce qui nous a plu le plus est qu’ils veulent seulement travailler avec nous. Ils ne s’attendent pas à ce qu’on vende des millions de disques. Tu comprends c’est une relation !
(Un autre) : Ils veulent motiver le groupe en nous laissant un grand espace artistique afin que nous grandissions en tant que groupe et on ne peut pas en demander plus …si, bien sûr, de l’argent mais petit à petit.

Dans le 2ème album aussi, il y a une version de « Spill The Wine » Pourquoi cette version ? Qui l’a faite en premier ?
Le premier c’est Eric Byrd le chanteur de Animals mais il l’a faite avec les membres de War. Ils l’ont enregistrée, c’était avant que War soit connus. On l’a choisi car c’est un rythme de quartier et un sentiment latino .
(Un autre) : On nous compare toujours à War et Malo.
Oui, on nous compare souven à War. En fait je crois que beaucoup connaissent la chanson et on voulait la faire différemment. Tous ceux qui reprennent War le font de la même manière que le morceau original mais en fait il aurait fallu faire une autre chanson d’autant plus que la version originale on l’entend toujours à la radio. Elle est si bonne cette version originale et nous, on ne l’a pas fait pour que cela devienne notre hit mais plutôt comme un hommage à War pour montrer qu’ils font partie de nos influences.

Tito Puente apparaît aussi dans l’album. C’est aussi un hommage ?
Oui, c’est un hommage à l’homme et à sa musique. C’est une chanson très simple. On n’a pas eu beaucoup à réfléchir sur ce que nous voulions dire. C’est encore une de nos influences et on a été très triste quand il a disparu. Il a influencé énormément de gens.
(Un autre) : C’est un des premiers à avoir amené la musique latine dans le jazz. Chez moi par exemple, en grandissant, on écoutait Sonora Santa Negra, Celia Cruz et Debilos. Donc un peu de tout.

Vous avez eu besoin d’autres musiciens pour cet album ?
Non, seulement de Karl Perrazzo musicien de Carlos Santana qui est un bon ami. Nous l’avons invité sur ce disque.
(Un autre) : Nous étions tous dans une « Mission Control » à Misión et là ils donnaient des cours de musique. Nous y avons tous pris des cours. Nous nous connaissons depuis l’âge de 14 ans.
Pour le premier disque Happy Sanchez a réuni tous les meilleurs musiciens qu’il connaissait pour enregistrer dans l’urgence mais Los Mocosos sur scène c’était d’autres personnes dont certains sont encore dans le groupe.
Pour le 2ème, on a décidé de ne pas refaire la même chose. On a entendu dire qu’ils voulaient refaire la même chose, avec les mêmes musiciens. Nous, en tant que groupe, nous avons décidé que seuls les musiciens du groupe présents sur scène enregistreraient. Moi comme percu, je ne suis pas Karl Perrazzo, je joue sur scène et non en studio. Il a donc enregistré toutes les percus sur le 2ème album et on avait aussi un guitariste Dave Shul qui lui a enregistré la guitare car Gabriel ne nous avait pas encore rejoint à l’époque.
Le 3ème disque, que nous enregistrerons à notre retour, sera une chose à nous, du groupe. On pourra dire que ce sera vraiment représentatif de ce que nous sommes. Nous voulons y retrouver l’esprit du groupe qui ne pouvait pas se refléter sur les premiers disques, ailleurs que sur scène. Nous voulons capter l’esprit et l’âme du groupe, transmettre cette énergie dans le prochain disque car les gens qui viennent au concert disent que c’est mieux que le CD.
Je pense que tout ce qui s’est passé dans le groupe a été une évolution nécessaire, comment dire, un professeur fou qui fait une expérience. Comme Frankenstein. Il l’a créé pensant pouvoir le contrôler mais Frankenstein avait ses propres sentiments et pensées et il est parti. C’est ce que je vois pour ce groupe. Cà a commencé comme une expérience et çà a fini comme une chose qui n’a plus rien à voir avec le commencement. Et c’est normal, c’est comme çà que cela doit être.

Tu parles d’évolution …comment vois-tu le futur ?
Moi je n’aime pas penser à ce qu’il va advenir car j’ai appris que l’unique chose que peut t’apporter, c’est la déception,…C’est pourquoi nous remercions Dieu et Six Degrees pour nous avoir donné l’opportunité d’enregistrer un disque vraiment à nous. Puis advienne ce qu’il adviendra. On sait que l’on va continuer à jouer, à tourner, à profiter. En jouant en concert on passe tellement du bon temps que les gens ressentent cette énergie et c’est pour çà qu’on aime tourner. Ce n’est que du bon temps. Les membres sont des types bien. Moi, je suis musicien depuis 20 ans et je sais que ce groupe maintient vraiment de bonnes relations, une connexion, ce qui n’est pas facile à 6-7 membres tous différents.
(Un autre) : Ce groupe est une bénédiction, nous formons une famille, nous sommes des amis. On n’a pas besoin de se parler. C’est naturel, on croit en ce que nous faisons, on croit en nous. Je crois que c’est le plus important. Quant au succès, on ne sait jamais mais nous continuons à nous entendre et cela ne cessera pas.
Pour nous ce fût une aventure d’aller en Europe car nous ne savions pas ce que nous allions y trouver. On nous a accueilli les bras ouverts partout. Dans tous les lieux où on a joué, çà s’est super bien passé. Ce n’était pas une aventure prévue, mais c’est une très bonne chose pour nous de venir en Europe, (rires) parce qu’on sait que l’on va revenir.
(Un autre) : Ce fût comme des vacances payées. (en s’adressant à l’un de ses compagnons) Qui a dit que c’était un travail ? (rires) Nous sommes des pros mais on peut se divertir en même temps, non ? Il y a beaucoup de musiciens professionnels qui font seulement ce qu’il doivent faire, se trouvent où ils doivent être, à l’heure à laquelle c’est prévu… mais ils ne profitent pas de la vie. Ils le voient comme un travail. Nous, nous sommes pros mais nous ne voyons pas cela comme un travail.
(Un autre) : Aux USA beaucoup de musiciens nous respectent parce qu’on continue à profiter, à nous divertir avec notre musique et les gens. Mais il y a beaucoup de musiciens avec qui on discute qui n’ont pas cette chance. Nous, nous avons de la chance, beaucoup de chance.

C’est donc votre première fois en Europe, qu’en pensez vous ?
Oui c’est la première fois en Europe.
Bordeaux est une ville splendide avec des filles superbes, les plus belles que j’ai jamais vu. Je suis sincère.
Hier on se baladait dans les rues et aujourd’hui, j’en ai encore mal au cou à force de me retourner et de regarder. Elles sont vraiment belles les filles d’ici, jolies à voir. Quant à la musique on n’a pas entendu grand chose ! Et les gens, ils sont très aimables. Hier soir on était dans un endroit appelé « Calle 8 » pour boire un coup et ils ont mis notre musique. On était très content car cela faisait bizarre d’être dans un lieu à l’étranger et d’entendre sa propre musique. On se sentait vraiment bien, à l’aise.

C’est la première date en France ?
La première et la seule.

Et ensuite ? L’Allemagne ?
On en revient, après demain c’est l’Espagne, direction Santander..

Vous savez, les filles sont plus belles encore en Espagne.
Figure toi que je te crois.

Une dernière question : San Francisco est aussi une ville de rap. Que pensez-vous de ce genre ? Est-ce une de vos influences ?
Oui absolument.
Dans le premier album, il n’y avait aucun rap, dans le second un morceau mais en concert il y en a plus. Même si beaucoup de gens disent ne pas aimer, ne pas écouter ce genre musical, tu ne pas passer à côté du hip-hop aux USA, tu ne peux pas éviter d’en entendre et de bouger la tête. Ce que je reproche au hip-hop c’est de dire beaucoup et rien à la fois. Tu comprends, ils parlent d’eux mêmes, de l’argent, des filles… Mais je crois que la nouvelle génération, le mouvement doit et va garder la rythmique mais en disant beaucoup plus de choses. C’est vrai que la majorité des gens de tout façon veut seulement danser.
(Un autre) : Nous autres on préfère parler de choses, de ce qui se passe, que ce soit la société, la famille, la personnalité des gens. On parle bien sûr aussi d’argent, de filles, il faut s’amuser mais il doit y avoir un équilibre.

Je crois qu’il y a un nouvelle scène musicale en Amérique latine et nord-américaine qui se développe et qui comme vous mélange les racines latines avec d’autres éléments : les ex DLG à New-York, Orishas, Ozomatli, El Gran Silencio au Mexique…Pour moi vous faîtes partie de cette nouvelle vague latine qui explose au niveau international ?
C’est ce que nous espérons. Je me rends compte que la majorité des groupes qui font des mélanges musicaux surgissent de pays latino-américains mais aux USA les seuls qui font dans un genre qui n’est pas rock en espagnol sont Ozomatli et nous. Les autres c’est du rock en espagnol ou un style particuliers comme Orishas qui est du hip-hop cubain.

Merci, bonne chance pour la suite
merci à vous.

Merci les Mocosos.

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